Avec ses 254 sélections en équipe de France de basket, elle est la recordwoman en la matière. Paoline Ekambi, née d'un père camerounais, ancien footballeur international, et d'une mère camerounaise, a réalisé une des plus belles carrières sportives dans l'hexagone. Modèle de reconversion réussie, elle retrace avec nous son merveilleux parcours ainsi que sa nouvelle vie.
Diasporas-News : Comment avez-vous découvert le basket et qu’est ce qui vous a donné envie de pratiquer ce sport?Paoline Ekambi : Pour tout vous dire, j'ai grandi au milieu de 4 frères, avec un papa footballeur. C'est donc tout naturellement que j'ai commencé à jouer au football. J’étais aussi une grande fan de boxe. Puis le basket est arrivé un peu par hasard. C’est au cours d'une d’une visite médicale banale que le médecin a constaté que j’avais grandi d’un coup à l’âge de 13 ans. Je mesurais 1m75. J’avais un début de scoliose. Il m’a alors conseillé de pratiquer un sport autre que le football pour préserver mon dos. J'avais le choix, d'après ses propositions entre basket, volley et natation. J'ai donc opté pour le basket.
D-N : Comment se déroulent vos premiers pas dans la discipline?
P.E : J’ai commencé au club de Sainte-Geneviève-des-Bois dans l’Essonne en départementale. Une camarade de classe jouait dans ce club. Elle m'y a emmenée et c'est parti comme ça. Je dois dire que c'était beaucoup plus pour rigoler que pour espérer faire carrière. L’année qui a suivi, à 14 ans, le conseiller technique régional m'a repérée pour me proposer intégrer l’INSEP. Avec à peine un an de basket, j'intègre cette structure de haut-niveau, puis trois ans après, à 17 ans, je deviens basketteuse professionnelle au Stade français. Et 6 mois plus tard, je deviens internationale. Voilà comment a commencé ma carrière qui a duré une vingtaine d'années.
D-N : Mais vous n'avez pas joué qu'en France...
P.E : Je suis allée en NCAA, le championnat universitaire américain. J’avais deux objectifs : concilier sport et études supérieures, ce qui ne pouvait se faire en France à l’époque. J’avais toujours gardé en tête le double projet sport et projet de vie (reconversion). Il faut dire que mes parents tenaient à ce que je fasse des études pour ne pas me retrouver en galère en cas de pépins physiques, et aussi pour préparer en amont mon après-carrière sportive. J’avais ça en tête depuis mes débuts à 17 ans et demi. J’étais allée en NCAA pour vivre à la fois le rêve américain sportif, suivre des études supérieures, maîtriser l’anglais, et découvrir une nouvelle culture. Là-bas je fais deux ans; j'ai même failli devenir professionnelle aux Etats-Unis, mais bon, avec les règlements américains, ce n'était pas évident.
D-N : Comment est arrivée l’offre de la fac de Marist College, une université new-yorkaise?
P.E : Inge Nissen, une joueuse danoise qui évoluait à Asnières et Mary-Ann O’connor, vice-championne Olympique à Montréal avec Team USA, mais qui jouaient avec moi, m’avaient toutes deux, conseillé de jouer en NCAA. Pour la petite histoire, à la même époque, le club italien de la Fiat de Torino m’avait aussi proposé de jouer en championnat italien qui était le plus relevé et était la référence en Europe à l’époque. Mais j’étais bien trop jeune et ça m'a fait un peu peur. Malgré cela, Mary-Ann O’connor, m’avait mise en relation avec Long Beach State University qui était deuxième du championnat NCAA. J'ai choisi Marist College parce que l’entraîneur de l’équipe masculine du Stade-Français Paris, Mike Perry, envisageait de retourner aux USA pour coacher les garçons à Marist, en emmenant avec lui quelques joueurs européens. Et ça m'a encouragée. C’est donc à 22 ans que je suis allée là-bas. J’avais obtenu une bourse de 4 ans mais j’étais éligible que 2 ans pour le basket.
À mon retour en France entre les 2 années universitaires, j’ai participé au Championnat d’Europe où j’avais très bien joué. On m'avait encore octroyé une bourse d'études mais, étant éligible que 2 ans pour le basket, être muté dans une autre université faisait de moi une « Red Shirt », ce qui veut dire que je ne pouvais pas jouer pendant un an. J’avais déjà effectué une année à Marist donc ça n’avait pas pu se faire.
D-N : 254 sélections en équipe de France c'est un beau record, en êtes-vous fière?
P.E : Porter le maillot bleu, a été une grande fierté et c’est un honneur d’avoir été une des ambassadrices du sport français à l’international. À l’INSEP, nos coaches nous avaient fait prendre conscience très tôt que nous représentions notre pays à travers le sport et nos comportements. Une des seules choses qui comptaient pour moi, c'était les titres. Le record de sélections était le cadet de mes soucis. J'aurais préféré gagner plus de titres avec mes copines. Très franchement, j’en ai ras-le-bol d’être présentée à chaque fois comme la recordwoman de sélections! C’est avant tout un sport collectif! Les 254 sélections prouvent juste ma régularité en équipe de France mais très sincèrement, je préfère la reconnaissance des performances collectives.
D-N : Quel type de joueuse étiez-vous?
P.E : Ce n’est pas évident de parler de soi. Tout ce que je peux dire c’est que la notion de plaisir est très importante pour moi, quoi que je puisse entreprendre. Je n’aimais pas trop les contraintes en général. J'aimais être libre de tenter des choses, et puis, je ne lâchais rien! À part ça, j’avais des qualités athlétiques, un sens de l’analyse et de l’anticipation. J’étais une joueuse polyvalente, plutôt une joueuse de percussion en 1 contre 1, qu'une shooteuse. Je détestais perdre. J’étais très orgueilleuse mais j’essayais de rester digne dans la défaite, humble dans la victoire.
D-N : Vous avez été élue deux fois Miss Europe Basket Ball. Comment avez-vous perçu que votre plastique soit mise en avant?
P.E : Ça ne m’avait absolument pas gêné, le contraire serait mentir. Que les gens me trouvent belle, c'est valorisant. Ce qui me gênait, c'était qu’on mette mon physique en avant au détriment des performances sportives.
D-N : Vous avez aussi fait un peu de mannequinat...
P.E : Oui, mais on m'avait demandé de laisser tomber le basket pour rester mannequin; j'ai refusé. Mais, bon, c'était quand même agréable (rires).
D-N : Parlons de votre reconversion. Vous avez travaillé dans la communication en créant votre agence, PEK Communication. Comment cela s'est-il, passé?
P.E : Après ma carrière, j’ai tout de suite voulu comprendre la culture de l’entreprise. Je me suis lancée dans le bain et j’ai appris mon métier pendant une quinzaine d’années. Il y a une vie après le sport! Je suis allée à HEC pour chercher une certification : stratégie et communication des marques. Avec cette certification, je me suis senti prête à travailler à mon compte. C’est le cas depuis le début de l’année 2014. Puis, avec des amis, on a monté une start-up qui s'appelle Sportail community. C'est mon nouveau rêve.
D-N : Qu'est-ce que Sportail community?
P.E : Nous sommes une plate-forme de mise en relation, un peu comme un Linkedin du sport. C'est la 1ère plateforme innovante de mise en relation et de Networking des sportifs de haut niveau. Notre projet a pour vocation de se développer à l’international. Et comme j'ai du sang africain, j'aimerais vraiment que les Africains nous rejoignent pour mettre en place des projets. Nous agissons à la fois chez les sportifs mais aussi chez les entreprises. Nous trouvons des opportunités d'affaires ou de recrutement pour les anciens sportifs. Nous motivons les sociétés à recruter des anciens sportifs, à niveau de formation équivalent avec un non sportif. C'est un gros projet qui, j'en suis sûre, va aider de nombreuses personnes; et j'espère de tout cœur que des Africains nous rejoindront. On a lancé le projet en janvier et on attend tout le monde. Sportail community, c'est le marché du sport, géré par des sportifs, mais pas que pour les sportifs. On a besoin d'investisseurs, de soutien. Je crois que ceux qui nous ferons confiance ne le regretteront pas! Visitez notre site, www.sportailcommunity.com.sportailcommunity.com , vous serez conquis! Et je dis bravo à votre magazine de mettre en lumière les Africains et ceux de la diaspora qui réussissent!
Interview réalisée par Malick Daho
Paru dans le Diasporas-News n°72 de Mars 2016
D-N : Comment se déroulent vos premiers pas dans la discipline?
P.E : J’ai commencé au club de Sainte-Geneviève-des-Bois dans l’Essonne en départementale. Une camarade de classe jouait dans ce club. Elle m'y a emmenée et c'est parti comme ça. Je dois dire que c'était beaucoup plus pour rigoler que pour espérer faire carrière. L’année qui a suivi, à 14 ans, le conseiller technique régional m'a repérée pour me proposer intégrer l’INSEP. Avec à peine un an de basket, j'intègre cette structure de haut-niveau, puis trois ans après, à 17 ans, je deviens basketteuse professionnelle au Stade français. Et 6 mois plus tard, je deviens internationale. Voilà comment a commencé ma carrière qui a duré une vingtaine d'années.
D-N : Mais vous n'avez pas joué qu'en France...
P.E : Je suis allée en NCAA, le championnat universitaire américain. J’avais deux objectifs : concilier sport et études supérieures, ce qui ne pouvait se faire en France à l’époque. J’avais toujours gardé en tête le double projet sport et projet de vie (reconversion). Il faut dire que mes parents tenaient à ce que je fasse des études pour ne pas me retrouver en galère en cas de pépins physiques, et aussi pour préparer en amont mon après-carrière sportive. J’avais ça en tête depuis mes débuts à 17 ans et demi. J’étais allée en NCAA pour vivre à la fois le rêve américain sportif, suivre des études supérieures, maîtriser l’anglais, et découvrir une nouvelle culture. Là-bas je fais deux ans; j'ai même failli devenir professionnelle aux Etats-Unis, mais bon, avec les règlements américains, ce n'était pas évident.
D-N : Comment est arrivée l’offre de la fac de Marist College, une université new-yorkaise?
P.E : Inge Nissen, une joueuse danoise qui évoluait à Asnières et Mary-Ann O’connor, vice-championne Olympique à Montréal avec Team USA, mais qui jouaient avec moi, m’avaient toutes deux, conseillé de jouer en NCAA. Pour la petite histoire, à la même époque, le club italien de la Fiat de Torino m’avait aussi proposé de jouer en championnat italien qui était le plus relevé et était la référence en Europe à l’époque. Mais j’étais bien trop jeune et ça m'a fait un peu peur. Malgré cela, Mary-Ann O’connor, m’avait mise en relation avec Long Beach State University qui était deuxième du championnat NCAA. J'ai choisi Marist College parce que l’entraîneur de l’équipe masculine du Stade-Français Paris, Mike Perry, envisageait de retourner aux USA pour coacher les garçons à Marist, en emmenant avec lui quelques joueurs européens. Et ça m'a encouragée. C’est donc à 22 ans que je suis allée là-bas. J’avais obtenu une bourse de 4 ans mais j’étais éligible que 2 ans pour le basket.
À mon retour en France entre les 2 années universitaires, j’ai participé au Championnat d’Europe où j’avais très bien joué. On m'avait encore octroyé une bourse d'études mais, étant éligible que 2 ans pour le basket, être muté dans une autre université faisait de moi une « Red Shirt », ce qui veut dire que je ne pouvais pas jouer pendant un an. J’avais déjà effectué une année à Marist donc ça n’avait pas pu se faire.
D-N : 254 sélections en équipe de France c'est un beau record, en êtes-vous fière?
P.E : Porter le maillot bleu, a été une grande fierté et c’est un honneur d’avoir été une des ambassadrices du sport français à l’international. À l’INSEP, nos coaches nous avaient fait prendre conscience très tôt que nous représentions notre pays à travers le sport et nos comportements. Une des seules choses qui comptaient pour moi, c'était les titres. Le record de sélections était le cadet de mes soucis. J'aurais préféré gagner plus de titres avec mes copines. Très franchement, j’en ai ras-le-bol d’être présentée à chaque fois comme la recordwoman de sélections! C’est avant tout un sport collectif! Les 254 sélections prouvent juste ma régularité en équipe de France mais très sincèrement, je préfère la reconnaissance des performances collectives.
D-N : Quel type de joueuse étiez-vous?
P.E : Ce n’est pas évident de parler de soi. Tout ce que je peux dire c’est que la notion de plaisir est très importante pour moi, quoi que je puisse entreprendre. Je n’aimais pas trop les contraintes en général. J'aimais être libre de tenter des choses, et puis, je ne lâchais rien! À part ça, j’avais des qualités athlétiques, un sens de l’analyse et de l’anticipation. J’étais une joueuse polyvalente, plutôt une joueuse de percussion en 1 contre 1, qu'une shooteuse. Je détestais perdre. J’étais très orgueilleuse mais j’essayais de rester digne dans la défaite, humble dans la victoire.
D-N : Vous avez été élue deux fois Miss Europe Basket Ball. Comment avez-vous perçu que votre plastique soit mise en avant?
P.E : Ça ne m’avait absolument pas gêné, le contraire serait mentir. Que les gens me trouvent belle, c'est valorisant. Ce qui me gênait, c'était qu’on mette mon physique en avant au détriment des performances sportives.
D-N : Vous avez aussi fait un peu de mannequinat...
P.E : Oui, mais on m'avait demandé de laisser tomber le basket pour rester mannequin; j'ai refusé. Mais, bon, c'était quand même agréable (rires).
D-N : Parlons de votre reconversion. Vous avez travaillé dans la communication en créant votre agence, PEK Communication. Comment cela s'est-il, passé?
P.E : Après ma carrière, j’ai tout de suite voulu comprendre la culture de l’entreprise. Je me suis lancée dans le bain et j’ai appris mon métier pendant une quinzaine d’années. Il y a une vie après le sport! Je suis allée à HEC pour chercher une certification : stratégie et communication des marques. Avec cette certification, je me suis senti prête à travailler à mon compte. C’est le cas depuis le début de l’année 2014. Puis, avec des amis, on a monté une start-up qui s'appelle Sportail community. C'est mon nouveau rêve.
D-N : Qu'est-ce que Sportail community?
P.E : Nous sommes une plate-forme de mise en relation, un peu comme un Linkedin du sport. C'est la 1ère plateforme innovante de mise en relation et de Networking des sportifs de haut niveau. Notre projet a pour vocation de se développer à l’international. Et comme j'ai du sang africain, j'aimerais vraiment que les Africains nous rejoignent pour mettre en place des projets. Nous agissons à la fois chez les sportifs mais aussi chez les entreprises. Nous trouvons des opportunités d'affaires ou de recrutement pour les anciens sportifs. Nous motivons les sociétés à recruter des anciens sportifs, à niveau de formation équivalent avec un non sportif. C'est un gros projet qui, j'en suis sûre, va aider de nombreuses personnes; et j'espère de tout cœur que des Africains nous rejoindront. On a lancé le projet en janvier et on attend tout le monde. Sportail community, c'est le marché du sport, géré par des sportifs, mais pas que pour les sportifs. On a besoin d'investisseurs, de soutien. Je crois que ceux qui nous ferons confiance ne le regretteront pas! Visitez notre site, www.sportailcommunity.com.sportailcommunity.com , vous serez conquis! Et je dis bravo à votre magazine de mettre en lumière les Africains et ceux de la diaspora qui réussissent!
Interview réalisée par Malick Daho
Paru dans le Diasporas-News n°72 de Mars 2016