Il fait partie de cette nouvelle génération de Français d'origine étrangère, nés en France, qui aiment la France sans chercher à en profiter mais en contribuant à son développement. Par son engagement politique et sociétal, ses actions sur le terrain, Abel Boyi, vrai modèle d'intégration veut amener les Français d'origine immigrée à aimer leur pays. Sans oublier d'où ils viennent. Interview.
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Diasporas – News : Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours?
Abel Boyi : Je suis né le 10 novembre 1981 à Paris 10e arrondissement. J'ai reçu une éducation classique, avec des parents qui ont fait l'effort, dès l'école maternelle, de nous mettre dans les meilleures conditions. Du coup les trois enfants que nous sommes avons fréquenté des écoles privées parce que mes parents tenaient à ce que nous ayons les meilleures bases pour avancer dans la vie. Ils voulaient aussi que nous ayons une bonne éducation républicaine française, que nous soyons parfaitement intégrés dans le pays dont nous avions la nationalité, c'est-à-dire la France. Il m'est arrivé d'être le seul Noir de ma classe, mais dès l'école terminée, je retrouvais mes amis Blacks et Beurs. J'ai donc vécu le brassage des peuples dès le plus jeune âge. Cette expérience très enrichissante me permet aujourd'hui de réussir à m'exprimer dans n'importe quel milieu.
D – N : Que se passe-t-il après le collège et le lycée?
A.B : Après mon BAC, je fais des études de psychologie. Puis dès que je valide ma Licence, je me marie. On était très jeunes. Du coup, il fallait trouver du travail. Donc, j'arrête les études pour travailler. Je tiens à vous dire que j'ai eu un parcours très atypique. Je me suis retrouvé dans l'événementiel. Je bossais comme assistant commercial pour une prestigieuse salle de réception, puis j'en suis rapidement devenu le directeur commercial sans avoir suivi le cursus commercial. En 2010, je monte ma propre boîte, Lys Events, dans l'événementiel. Je gérais aussi un site de référencement pour les salles de réceptions. En 2012, j'ai eu une opportunité politique, car il faut dire que dès 2007, avec la campagne Sarkozy-Royal, j'ai vraiment commencé à m'intéresser à la politique. Quand je pense que mon père nous défendait de faire de la politique! Là ça m'a tout de suite séduit. Une opportunité se présente donc avec le Parti démocrate chrétien de Christine Boutin. Ce parti recherchait des candidats. Comme je faisais parti d'un think tank politico-chrétien, ils m'ont proposé d'être candidat dans la 5e circonscription de Paris pour les législatives. Je n'ai pas gagné, mais j'ai fait assez de bruit pour que cela se voit. Du coup, en 2014, je suis entré dans l'équipe de campagne de l'actuel maire d'Asnières-sur-Seine, Daniel Aeschlimann. Après sa victoire, et compte tenu de nos très bons rapports humains, je suis devenu son directeur de cabinet. Je luis serais toujours reconnaissant d'avoir osé prendre un Noir à ce poste-là, ce contre de nombreux avis contraires. Là aussi, l'expérience a été extraordinaire.
D – N : Aujourd'hui, que faites-vous?
A.B : Après Asnières, je suis devenu directeur de la communication d'un groupement d’associations, une centaine, s'occupant des Harkis, Pieds Noirs et rapatriés (UNHERPNE) soit 300.000 personnes à gérer sur toute la France. C'est une structure formidable avec de belles personnes. Mais j'ai arrêté d'y travailler il y a six mois pour me consacrer à l'écriture de mon livre intitulé La jeunesse des quartiers face aux défis du patriotisme et de la cohésion sociale, sorti le 10 février dernier. J'y traite du vivre ensemble, de l'intégration-assimilation et de l'inclusion sociale. Grâce à ce livre, j'organise des réunions civiques où j'encourage les jeunes à aimer la France, pas à la détester. Il vraiment temps de se mettre à aimer ce pays, surtout les Français d'origine immigrée. Mais en même temps, lorsque je me retrouve avec les politiques, je fustige la politique de ghettoïsation, ce qui conduit à des attitudes malencontreuses, que je ne cautionne pas, mais que je peux comprendre. Enfin, depuis deux mois je travaille au QG de campagne de François Fillon, candidat à l'élection présidentielle. Même s'il n'a pas gagné, on travaillera en vue des législatives. Il n'est pas exclu d'ailleurs que je sois candidat. J'essaie justement de tordre le coup à cette légende urbaine qui fait croire que tous les Noirs votent à gauche. J'ai d'ailleurs très bien été accepté dans ce milieu. Je travaille beaucoup avec l'ancien ministre Charles Millon, qui a beaucoup travaillé avec l'Afrique, et qui y a encore de solides amitiés.
Abel Boyi : Je suis né le 10 novembre 1981 à Paris 10e arrondissement. J'ai reçu une éducation classique, avec des parents qui ont fait l'effort, dès l'école maternelle, de nous mettre dans les meilleures conditions. Du coup les trois enfants que nous sommes avons fréquenté des écoles privées parce que mes parents tenaient à ce que nous ayons les meilleures bases pour avancer dans la vie. Ils voulaient aussi que nous ayons une bonne éducation républicaine française, que nous soyons parfaitement intégrés dans le pays dont nous avions la nationalité, c'est-à-dire la France. Il m'est arrivé d'être le seul Noir de ma classe, mais dès l'école terminée, je retrouvais mes amis Blacks et Beurs. J'ai donc vécu le brassage des peuples dès le plus jeune âge. Cette expérience très enrichissante me permet aujourd'hui de réussir à m'exprimer dans n'importe quel milieu.
D – N : Que se passe-t-il après le collège et le lycée?
A.B : Après mon BAC, je fais des études de psychologie. Puis dès que je valide ma Licence, je me marie. On était très jeunes. Du coup, il fallait trouver du travail. Donc, j'arrête les études pour travailler. Je tiens à vous dire que j'ai eu un parcours très atypique. Je me suis retrouvé dans l'événementiel. Je bossais comme assistant commercial pour une prestigieuse salle de réception, puis j'en suis rapidement devenu le directeur commercial sans avoir suivi le cursus commercial. En 2010, je monte ma propre boîte, Lys Events, dans l'événementiel. Je gérais aussi un site de référencement pour les salles de réceptions. En 2012, j'ai eu une opportunité politique, car il faut dire que dès 2007, avec la campagne Sarkozy-Royal, j'ai vraiment commencé à m'intéresser à la politique. Quand je pense que mon père nous défendait de faire de la politique! Là ça m'a tout de suite séduit. Une opportunité se présente donc avec le Parti démocrate chrétien de Christine Boutin. Ce parti recherchait des candidats. Comme je faisais parti d'un think tank politico-chrétien, ils m'ont proposé d'être candidat dans la 5e circonscription de Paris pour les législatives. Je n'ai pas gagné, mais j'ai fait assez de bruit pour que cela se voit. Du coup, en 2014, je suis entré dans l'équipe de campagne de l'actuel maire d'Asnières-sur-Seine, Daniel Aeschlimann. Après sa victoire, et compte tenu de nos très bons rapports humains, je suis devenu son directeur de cabinet. Je luis serais toujours reconnaissant d'avoir osé prendre un Noir à ce poste-là, ce contre de nombreux avis contraires. Là aussi, l'expérience a été extraordinaire.
D – N : Aujourd'hui, que faites-vous?
A.B : Après Asnières, je suis devenu directeur de la communication d'un groupement d’associations, une centaine, s'occupant des Harkis, Pieds Noirs et rapatriés (UNHERPNE) soit 300.000 personnes à gérer sur toute la France. C'est une structure formidable avec de belles personnes. Mais j'ai arrêté d'y travailler il y a six mois pour me consacrer à l'écriture de mon livre intitulé La jeunesse des quartiers face aux défis du patriotisme et de la cohésion sociale, sorti le 10 février dernier. J'y traite du vivre ensemble, de l'intégration-assimilation et de l'inclusion sociale. Grâce à ce livre, j'organise des réunions civiques où j'encourage les jeunes à aimer la France, pas à la détester. Il vraiment temps de se mettre à aimer ce pays, surtout les Français d'origine immigrée. Mais en même temps, lorsque je me retrouve avec les politiques, je fustige la politique de ghettoïsation, ce qui conduit à des attitudes malencontreuses, que je ne cautionne pas, mais que je peux comprendre. Enfin, depuis deux mois je travaille au QG de campagne de François Fillon, candidat à l'élection présidentielle. Même s'il n'a pas gagné, on travaillera en vue des législatives. Il n'est pas exclu d'ailleurs que je sois candidat. J'essaie justement de tordre le coup à cette légende urbaine qui fait croire que tous les Noirs votent à gauche. J'ai d'ailleurs très bien été accepté dans ce milieu. Je travaille beaucoup avec l'ancien ministre Charles Millon, qui a beaucoup travaillé avec l'Afrique, et qui y a encore de solides amitiés.
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D – N : En tant donc que modèle d'une intégration réussie, comment expliquez-vous que beaucoup de jeunes Noirs ou Maghrébins refusent de s'intégrer, préférant rester entre eux. Est-ce toujours la faute du Blanc ?
A.B : Non, je pense qu'on a notre part de responsabilité dans cette situation. On ne fait pas cet effort de s'ouvrir aux autres, mais on est prompt à crier au racisme au moindre problème. Pourtant, non seulement tous les Blancs ne sont pas racistes, mais aussi, il faut savoir que le racisme ne va pas dans un seul sens. Si nous voulons vraiment nous prévaloir du message de Martin Luther King, nous devons comprendre que son message était axé sur le vivre ensemble. Il ne sert à rien, même en cas de rejet, de répondre par un autre rejet, à la méchanceté par la méchanceté, sans oublier que chacun a sa propre définition du rejet ou de la méchanceté. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de discrimination, mais ce n'est pas une raison pour vivre cloisonné. Nous devons nous battre pour obtenir des choses; il ne faut pas attendre que ça tombe car on risque d'attendre longtemps. C'est pourquoi, j'ai envie d'aller très loin en politique afin, sans prétention aucune, de pouvoir encourager d'autres Noirs à s'engager. Il n'y a pas que le sport et la musique pour nous. On doit pouvoir réussir partout, pour peu qu'on s'en donne la volonté et les moyens. Brisons les barrières, allons parler avec l'autre, nous verrons que c'est une grande richesse. Il n'y a aucune race en rapport avec la couleur de peau; nous sommes la race humaine!
D – N : Un Noir président de la France, vous y croyez?
A.B : Cela pourrait arriver, mais pas tout de suite, à mon avis. Je dirais pas avant une bonne trentaine voire une quarantaine d'années. Pour que cela arrive, il faut que les Noirs aient une vraie visibilité dans toutes les sphères de la société française. Et qu'ils soient compétents aussi. Regardez ce qui se passe en ce moment. De nombreux Noirs vivent en France, mais leur investissement va ailleurs. Rares sont ceux qui ont compris que leur vie est en France. Je ne dis pas qu'il ne faille pas investir dans son pays d'origine, mais investir en France permet justement de s'approprier un peu ce pays. Et puis, arrêtons d'être égoïstes entre nous! Si on forme un vrai réseau de compétences et d'entraide, on peut avoir une vraie visibilité. Or, bien souvent, ce sont des réseaux pour aller contre le pays dans lequel on vit.
D – N : Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Noirs vivant en France afin de les aider à mieux s'intégrer tout en acceptant qu'ils sont bel et bien Français?
A.B : Le premier piège à éviter, c'est que j'appellerais l'effet boule de neige. Si on voit des personnes qui se marginalisent dans la cité où on vit, avec des slogans hostiles à la société, on n'est pas obligé de les suivre. Bien au contraire, il faut essayer d'aller le plus loin possible dans les études, s'intéresser à la culture de ce pays, à l'art ou l'actualité. Notre multi-culturalité peut être une richesse pour la France. La banlieue, c'est le territoire le plus riche mais qui vit comme le plus pauvre, c'est dommage!
D – N : Vous êtes croyant et pratiquant. Est-ce que la vie politique est compatible avec la foi? N'y a-t-il pas trop de compromissions pour quelqu'un qui voudrait vraiment vivre sa foi?
A.B : (Rires) Personnellement, je n'ai pas encore eu à faire des choix entre ma foi et les décisions un peu tordues. On peut faire de la politique sans renier ses convictions. Mais je vous mentirais en disant qu'il n'y a pas de requins en politique. Les coups bas, les trahisons y sont légion, mais je me garde de tout cela. J'évite aussi de laisser trainer mes oreilles n'importe où (rires). Je reste concentré sur ce que j'ai à faire.
D – N : Votre épouse est chanteuse gospel, chrétienne comme vous; comment gérez-vous vos carrières respectives en plus de vos trois enfants?
A.B : Waouh ! On a des emplois du temps très compliqués. On essaie de gérer les absences de l'un ou de l'autre de la façon la plus idoine qui soit. Et lorsque nous devons nous absenter tous les deux, les parents nous aident beaucoup. Cela dit, nous faisons le maximum pour être là pour nos enfants. La famille, c'est quelque chose de tellement bon que nous faisons en sorte d'être les meilleurs parents possibles. Nous avons des moments familiaux très importants où nous manifestons beaucoup d'amour, d'unité et de joie en famille. Et il est hors de question de sacrifier la famille, les enfants pour je ne sais quelle cause. On sera toujours là pour nos enfants.
D – N : Vous êtes aussi un grand fan de sport et de basket NBA en particulier. Est-ce un exutoire pour vous?
A.B : A la base je viens du foot, et j'en ai fait jusqu'à un niveau assez intéressant. J'ai eu un frère basketteur et un autre qui aime la course à pied. J'aime la NBA qui est un monde à part, une culture indépendante, des histoires et des confrontations mythiques, c'est un régal! Des personnes comme Bill Russell qui dominait ce sport à une période où il aurait pu être aigri contre les Blancs ne l'ont pas fait. Il a été un fédérateur. Aujourd'hui, c'est le seul homme qui a plus de bagues de champion NBA que de doigts et c'est une fierté. Ce genre d'histoires m'intéresse. Le sport est un exutoire, un décompresseur et une passion. J'en fais beaucoup et c'est important pour mon équilibre. C'est une école de vie aussi.
D – N : Un mot sur l'Afrique, ne serait-ce que sur la politique qui y est menée?
A.B : Je n'oublie pas d'où je viens. Et puis, je suis directement concerné. Mon beau père est prisonnier politique au Congo depuis un an parce qu'il militait dans un autre parti que celui du pouvoir en place. D'ailleurs, j'aimerais saluer le courage de mon épouse qui vit la détention de son père avec courage, même si ce n'est pas facile. Malgré cela, elle a accepté de chanter lors de la cérémonie de clôture des derniers Jeux africains qui s'y sont déroulé. D'une manière générale, il faudrait que la relation ambigüe entre l'Afrique et les pays occidentaux cesse. L'Afrique a les moyens de se développer; il faut qu'elle y croie elle-même. Tous les débats actuels sur le Franc CFA, c'est hallucinant! Comment une monnaie qui concerne de nombreux pays et des millions de personnes peut être fabriquée en France, c'est-à-dire hors d'Afrique? En plus, les pays africains payent une taxe à la France pour utiliser leur propre monnaie, c'est choquant. Certains chefs d'état africains, devraient un peu plus penser au peuple qu'à eux-mêmes. Quand je regarde le sol et le sous-sol de l'Afrique, ce continent devait ressembler aux pays du Golfe. Hélas, ce continent si riche vit si pauvrement. L'Afrique mérite mieux que ça. Il faudrait vraiment revoir certaines relations "incestueuses ou œdipiennes" avec l'Occident. Il faut que la coopération avec l'Occident soit gagnant-gagnant. Il faut qu'une élite de jeunes africains se lève et mette en place une coopération différente avec le reste du monde. Ce sera déjà un bon début!
Propos recueillis par Malick Daho
Paru dans le Diasporas-News n°85 de Mai 2017
A.B : Non, je pense qu'on a notre part de responsabilité dans cette situation. On ne fait pas cet effort de s'ouvrir aux autres, mais on est prompt à crier au racisme au moindre problème. Pourtant, non seulement tous les Blancs ne sont pas racistes, mais aussi, il faut savoir que le racisme ne va pas dans un seul sens. Si nous voulons vraiment nous prévaloir du message de Martin Luther King, nous devons comprendre que son message était axé sur le vivre ensemble. Il ne sert à rien, même en cas de rejet, de répondre par un autre rejet, à la méchanceté par la méchanceté, sans oublier que chacun a sa propre définition du rejet ou de la méchanceté. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de discrimination, mais ce n'est pas une raison pour vivre cloisonné. Nous devons nous battre pour obtenir des choses; il ne faut pas attendre que ça tombe car on risque d'attendre longtemps. C'est pourquoi, j'ai envie d'aller très loin en politique afin, sans prétention aucune, de pouvoir encourager d'autres Noirs à s'engager. Il n'y a pas que le sport et la musique pour nous. On doit pouvoir réussir partout, pour peu qu'on s'en donne la volonté et les moyens. Brisons les barrières, allons parler avec l'autre, nous verrons que c'est une grande richesse. Il n'y a aucune race en rapport avec la couleur de peau; nous sommes la race humaine!
D – N : Un Noir président de la France, vous y croyez?
A.B : Cela pourrait arriver, mais pas tout de suite, à mon avis. Je dirais pas avant une bonne trentaine voire une quarantaine d'années. Pour que cela arrive, il faut que les Noirs aient une vraie visibilité dans toutes les sphères de la société française. Et qu'ils soient compétents aussi. Regardez ce qui se passe en ce moment. De nombreux Noirs vivent en France, mais leur investissement va ailleurs. Rares sont ceux qui ont compris que leur vie est en France. Je ne dis pas qu'il ne faille pas investir dans son pays d'origine, mais investir en France permet justement de s'approprier un peu ce pays. Et puis, arrêtons d'être égoïstes entre nous! Si on forme un vrai réseau de compétences et d'entraide, on peut avoir une vraie visibilité. Or, bien souvent, ce sont des réseaux pour aller contre le pays dans lequel on vit.
D – N : Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Noirs vivant en France afin de les aider à mieux s'intégrer tout en acceptant qu'ils sont bel et bien Français?
A.B : Le premier piège à éviter, c'est que j'appellerais l'effet boule de neige. Si on voit des personnes qui se marginalisent dans la cité où on vit, avec des slogans hostiles à la société, on n'est pas obligé de les suivre. Bien au contraire, il faut essayer d'aller le plus loin possible dans les études, s'intéresser à la culture de ce pays, à l'art ou l'actualité. Notre multi-culturalité peut être une richesse pour la France. La banlieue, c'est le territoire le plus riche mais qui vit comme le plus pauvre, c'est dommage!
D – N : Vous êtes croyant et pratiquant. Est-ce que la vie politique est compatible avec la foi? N'y a-t-il pas trop de compromissions pour quelqu'un qui voudrait vraiment vivre sa foi?
A.B : (Rires) Personnellement, je n'ai pas encore eu à faire des choix entre ma foi et les décisions un peu tordues. On peut faire de la politique sans renier ses convictions. Mais je vous mentirais en disant qu'il n'y a pas de requins en politique. Les coups bas, les trahisons y sont légion, mais je me garde de tout cela. J'évite aussi de laisser trainer mes oreilles n'importe où (rires). Je reste concentré sur ce que j'ai à faire.
D – N : Votre épouse est chanteuse gospel, chrétienne comme vous; comment gérez-vous vos carrières respectives en plus de vos trois enfants?
A.B : Waouh ! On a des emplois du temps très compliqués. On essaie de gérer les absences de l'un ou de l'autre de la façon la plus idoine qui soit. Et lorsque nous devons nous absenter tous les deux, les parents nous aident beaucoup. Cela dit, nous faisons le maximum pour être là pour nos enfants. La famille, c'est quelque chose de tellement bon que nous faisons en sorte d'être les meilleurs parents possibles. Nous avons des moments familiaux très importants où nous manifestons beaucoup d'amour, d'unité et de joie en famille. Et il est hors de question de sacrifier la famille, les enfants pour je ne sais quelle cause. On sera toujours là pour nos enfants.
D – N : Vous êtes aussi un grand fan de sport et de basket NBA en particulier. Est-ce un exutoire pour vous?
A.B : A la base je viens du foot, et j'en ai fait jusqu'à un niveau assez intéressant. J'ai eu un frère basketteur et un autre qui aime la course à pied. J'aime la NBA qui est un monde à part, une culture indépendante, des histoires et des confrontations mythiques, c'est un régal! Des personnes comme Bill Russell qui dominait ce sport à une période où il aurait pu être aigri contre les Blancs ne l'ont pas fait. Il a été un fédérateur. Aujourd'hui, c'est le seul homme qui a plus de bagues de champion NBA que de doigts et c'est une fierté. Ce genre d'histoires m'intéresse. Le sport est un exutoire, un décompresseur et une passion. J'en fais beaucoup et c'est important pour mon équilibre. C'est une école de vie aussi.
D – N : Un mot sur l'Afrique, ne serait-ce que sur la politique qui y est menée?
A.B : Je n'oublie pas d'où je viens. Et puis, je suis directement concerné. Mon beau père est prisonnier politique au Congo depuis un an parce qu'il militait dans un autre parti que celui du pouvoir en place. D'ailleurs, j'aimerais saluer le courage de mon épouse qui vit la détention de son père avec courage, même si ce n'est pas facile. Malgré cela, elle a accepté de chanter lors de la cérémonie de clôture des derniers Jeux africains qui s'y sont déroulé. D'une manière générale, il faudrait que la relation ambigüe entre l'Afrique et les pays occidentaux cesse. L'Afrique a les moyens de se développer; il faut qu'elle y croie elle-même. Tous les débats actuels sur le Franc CFA, c'est hallucinant! Comment une monnaie qui concerne de nombreux pays et des millions de personnes peut être fabriquée en France, c'est-à-dire hors d'Afrique? En plus, les pays africains payent une taxe à la France pour utiliser leur propre monnaie, c'est choquant. Certains chefs d'état africains, devraient un peu plus penser au peuple qu'à eux-mêmes. Quand je regarde le sol et le sous-sol de l'Afrique, ce continent devait ressembler aux pays du Golfe. Hélas, ce continent si riche vit si pauvrement. L'Afrique mérite mieux que ça. Il faudrait vraiment revoir certaines relations "incestueuses ou œdipiennes" avec l'Occident. Il faut que la coopération avec l'Occident soit gagnant-gagnant. Il faut qu'une élite de jeunes africains se lève et mette en place une coopération différente avec le reste du monde. Ce sera déjà un bon début!
Propos recueillis par Malick Daho
Paru dans le Diasporas-News n°85 de Mai 2017