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Upf : les assises de la discorde à Lomé

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Le choix est porté cette année sur le Togo pour abriter, du 25 au 29 novembre prochain, après celles de 2005, les 44èmesassises de l’Union internationale de la presse francophone (Upf) autour du thème, « La femme et la presse ».Cette conférence de grande envergure ne semble pas faire l’unanimité chez les confrères togolais. Une division de la presse locale assortie d’un mémorandum sur fond de menace fait planer du doute sur la réussite des assises de Lomé. Le secrétariat général de l’Upf, lui, appelle, sans toutefois taire les polémiques, à la conjugaison des forces pour « re-construire », au-delà des déchirures, la presse francophone à l’heure du développement du numérique.
Upf : les assises de la discorde à Lomé
À Lomé, la polémique enfle, se médiatise et déchire. La presse locale émet des réserves autour de la tenue dans la capitale togolaise des 44èmes assises. Dans un mémorandum rendu public, « le noyau dur » de membres de la section locale de l’Upf du Togo se désolidarise de la tenue de ces assises pour, dit-il, n’avoir pas été concerté.
Frustration. Lors de sa visite en terre togolaise, le président international de l’Upf Madiambal Diagne a été reçu en audience en mars 2015 par le Chef de l’État SEM Faure Gnassingbé qui a donné son accord de principe pour l’organisation  de cette rencontre. Ce qui fâche, c’est que le Sénégalais Madiambal Diagne, non seulement, ne « s’est pas fait accompagner du responsable de la section locale qui a été coopté par l’Union elle-même, mais du président du Conseil national des patrons de presse (Conapp) », il n’a pas pu, non plus, « prendre langue avec les membres (Ndlr : de la section locale de l’Upf) », pestent les frondeurs. Le président du Conapp, Jean-Paul Agbo, lui, dément avoir accompagné le président de l’Union à l’audience que SEM Faure Gnassingbé a accordée dans la matinée du 30 mars 2015.  Le 8 juillet 2015, M. Diagne était de nouveau à Lomé avec son vice-président Jean Miot pour « mettre en place les bases de l’organisation des assises ». Accompagnée de Mey Gnassingbé, demi-frère du Chef de l’État togolais, Directeur du site africatopsports.com, la délégation de l’Upf a rencontré, le 10 juillet, le Premier ministre Komi Selom Klassou pour faire l’état des lieux. Les « frondeurs »dénoncent « une affaire d’amis, d’initiés et non de journalistes » et qualifient ces assises de Lomé de « business ».La polémique risque de couler la bielle à l’organisation. Une réunion tenue le 31 juillet qui a regroupé à peine une vingtaine de journalistes togolais pour dissiper les malentendus s’est terminée en queue de poisson au sujet de la réhabilitation de l’Ufp, section locale avant l’organisation des assises de Lomé. Pas question. Pour le Conapp, « c’est l’Upf internationale qui organise les assises ».
 
 
Peinture. Au-delà de tout, ce mémorandum est l’occasion pour ses signataires de faire une peinture en noir de la situation de la presse togolaise et d’en conclure sur l’ « inopportunité »  des assises de Lomé. En décidant d’accompagner et d’investir beaucoup de moyens pour la réussite des 44èmes assises de l’Ufp, au moment où la presse locale vit dans « une forme de supplice au quotidien », le pouvoir de Lomé « habitué aux pratiques liberticides », visiblement, veut se repositionner  comme « un ami des médias » et attirer la sympathie de la presse internationale, à en croire ceux qui trouvent « inopportune » la tenue de ces assises. Ils avancent pour preuve, la détention, jusqu’à ce jour, à la prison civile de Lomé, de Benero Lawson, Directeur de la publication du bimensuel La Nouvelle et membre de l’Upf « vulgairement » enlevé le 09 mai dernier suite à une plainte du ministre de la Sécurité et de la Protection civile, Colonel Yark Damehame, la fermeture des radios X-Solaire et Légende, l’interdiction de publication du journal Gazette du Golfe. Récemment, les Directeurs du quotidien Liberté, Zeus Aziadouvo et de la chaîne de télévision privée LCF (La Chaîne du Futur), Luc Abakiont été convoqués au Service de renseignements et d’investigation (Sri) de la Gendarmerie nationale suite à la production et à la diffusion d’un documentaire sur la prison civile de Lomé.
 
Aujourd’hui, les entreprises de presse au Togo manquent cruellement des moyens pour leur viabilité. Peu en résistent. La plupart d’entre elles ont dû mettre la clef sous le paillasson. L’aide de l’État à la presse est jugée très insuffisante, mais difficilement débloquée. «  Le même gouvernement qui a dû mal à accorder un montant de 100 millions de F.CFA (au titre de l’aide de l’État à la presse) à toute la presse togolaise par an,  trouve subitement les moyens d’accorder un montant qui dépasse de 200% pour soutenir une conférence de quelques jours », fulmine un journaliste de la presse écrite.
 
Si certains professionnels des médias saluent la tenue à Lomé de ces assises dont ils espèrent les répercussions pour la presse locale et le pays, d’autres restent pessimistes. «  En ces moments difficiles pour la presse togolaise où la plupart des acteurs broient du noir, il est inconcevable  que 402.500 euros (plus de 263 millions de F CFA) –ce qui représente l’aide de l’État à la presse togolaise de trois ans et demi –soient mobilisés pour des assises de quatre jours. Si selon le président Madiambal Diagne, à l’issue de l’audience, le Premier ministre au cours de l’entretien s’est félicité du choix du Togo pour abriter une telle assise de la presse francophone qui, pour lui,  est « une opportunité pour contribuer davantage au renforcement de la démocratie au Togo, au renforcement des médias au Togo, mais aussi un acte important pour rendre le Togo plus visible à travers le monde », nous, les membres des section locales, proclamons que ces assises ne vont rien apporter à la presse togolaise », lit-on dans ce mémorandum. Ses signataires invitent « alors le Bureau international de l’Upf à revoir sa copie et à reporter la tenue de ces assises du Togo », faute de quoi, ils disent « mobiliser tous les moyens professionnels des médias pour s’opposer à l’organisation de ces assises ».

 

Upf : les assises de la discorde à Lomé
Chapelle. Peter Dogbé, correspondant de Rfi (Radio France internationale) à Lomé, est le responsable de la section locale de l’Upf. Joint au téléphone par Diasporas-News, il se garde de tout commentaire sur ce mémorandum. « Est-ce que c’est parce qu’il y a une situation politique délétère dans notre pays que nous allons nous mettre à l’écart et dire, c’est la dictature et attendre la fin de la dictature pour faire quelque chose ? C’est une option, les gens peuvent l’explorer. D’autres peuvent dire non, on ne va pas rester à l’écart. Parce que si on est à l’écart, est-ce que ça apporte quelque chose ? » S’interroge-t-il. Et d’ajouter que « c’est une question de chapelle ». « Ce n’est pas avant qu’on jauge, c’est après qu’on jauge. De la même manière, nous allons jauger ce que nous allons faire à Lomé après, pas avant. Vouloir empêcher ce qui va se faire, moi, je ne rentre pas dans ce jeu. Le gouvernement a donné son appui. Que ça soit l’appui d’une dictature ou d’une démocratie, le gouvernement a compris l’enjeu. Ces assises sont une opportunité, un cadre pour nous de réfléchir sur une situation, les grands enjeux », précise-t-il.

 

Upf : les assises de la discorde à Lomé
D’ailleurs, en réponse à ce mémorandum, le Secrétaire général de l’Upf, Jean Kouchner, a adressé une correspondance au « noyau dur » de Lomé. « Nous considérons que les questions de la liberté de la presse et des médias francophones, dans un contexte de développement du numérique, méritent d’unir nos forces et non de développer de vaines polémiques. Au-delà des différences naturelles – voire des oppositions – entre journalistes et médias, nos intérêts communs appellent à une construction commune d’une UPF active et dynamique dans chaque pays francophone », a-t-il écrit. Le Secrétaire général de l’Upf et son président, annoncés  pour une mission à Lomé entre le 31 août et le 02 septembre2015, devaient rencontrer les signataires de ce mémorandum pour « éclairer le débat et les objectifs » recherchés.  
Pierre-Claver KUVO

Paru dans le Diasporas-News n°66 de Septembre 2015

 


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