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Dossier: L’Afrique au G20 de Hambourg

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Les Sommets se suivent et se ressemblent : les Etats-Unis s’enfoncent inexorablement dans le protectionnisme et leur isolationnisme. Climat, commerce et terrorisme étaient au menu à Hambourg. Que dire de l’Afrique chère à la chancelière Angela Merkel ? Elle est déjà passée en avant-première, dès le mois de juin, à Berlin.
Dossier: L’Afrique au G20 de Hambourg
Après Hangzhou (Chine) l’année dernière et avant Buenos-Aires en 2018, le grand barnum du G20 est passé par Hambourg. Le G20 ? Cette sorte de comité directeur mondial qui fut institué en 1999 après le krach boursier asiatique de 1997. L’explosion de cette bulle spéculative menaçait alors de faire s’écrouler le système financier international. Il fallait donc trouver un espace de concertation pour réguler l’économie planétaire. A l’origine, il s’agissait d’un rendez-vous annuel des ministres des Finances et des gouverneurs de banques centrales des pays industrialisés et des pays émergents. En 2008, la crise immobilière (les subprimes) étasunienne provoque une grave crise économique mondiale, semblable à celle de 1929. L’Union Européenne (UE) - grâce à l’activisme du président Nicolas Sarkozy coïncidant avec la présidence européenne par la France - plaide en faveur d’une coopération internationale élargie c’est-à-dire au plus haut au sommet de chaque Etat et au-delà du format habituel du G8.

Le dernier mot reviendra au président G.W. Bush qui convoqua un sommet extraordinaire des chefs d’Etat des vingt pays les plus riches à Washington en novembre 2008. Cette date marquera la reconnaissance implicite du poids des pays émergents dans la gouvernance mondiale même si ce cénacle n’est pas une organisation internationale telle qu’elle est définie par la charte des Nations-Unies.
Ce G20 - 19 pays et l’UE - représente à lui tout seul plus de 85% de l’économie mondiale et 2/3 de la population de la planète. Et le reste du monde ? Depuis les années 1990, en marge de ces réunions internationales, un espace a été ouvert aux ONG et à la société civile pour faire entendre la voix des populations démunies. Mais ces grands raouts sont aussi devenus le rendez-vous des altermondialistes souvent très radicaux pour dénoncer cette dérive du capitalisme et ses conséquences. On se souviendra de Seattle (1999) avec le déferlement de violences de plus de 40.000 manifestants lors de la conférence ministérielle de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à l’occasion du lancement d'un nouveau cycle commercial.

Fiasco sur toute la ligne : le Sommet fut simplement annulé en raison de l’instauration de l’état d’urgence par les autorités de la ville. Ou encore, le Sommet du G8 à Gênes (Italie) en 2001 : 300.000 personnes dans les rues. L’affrontement avec la police fut fatal pour un jeune manifestant italien tué et avec plus de 500 personnes blessées.
 

Dossier: L’Afrique au G20 de Hambourg
L’ordre du jour de Hambourg 
 
On compte 36 personnalités sur la photo de famille. Outre les chefs d’Etat et du gouvernement des 19 pays membres et l’UE - représentée par son Président du Conseil et celui de la Commission Européenne-, on a observé la présence des Directeurs ou Présidents d’institutions internationales (Banque Mondiale, FMI, ONU…). Le premier Ministre vietnamien Nguyn Xuan Phuc représentait l’Asie. Pour le continent africain, quatre dirigeants ont participé au G20 : le président Jacob Zuma pour l’Afrique du Sud (membre du G20), le président guinéen Alpha Condé en tant que président de l’Union Africaine, son homologue sénégalais Macky Sall - président en exercice du NEPAD – et l’éthiopien Tedros Ghebreyesus comme Directeur Général de l’OMS.
 
Cette 12ème édition du sommet du G20 était placée sous le thème suivant : « formons un monde interconnecté ». Elle fut encore une fois marquée par des profondes divergences sur les principaux sujets abordés : le climat et le commerce. Comme pour le sommet du G7 du mois de juin dernier à Taormina (Italie), l’attitude cavalière du président Donald Trump s’est heurtée à la fronde de tous ses alliés. La rédaction du communiqué final a été un casse-tête. Les sherpas ont dû passer une nuit blanche pour peser aux trébuchets les mots, trouver des formules alambiquées pour satisfaire à l’intransigeance de l’aigle américain. Oncle Sam ne fait pas mystère de sa volonté de libéraliser sans entrave le commerce mondial tout en voulant ériger le protectionnisme sur son sol. Washington a également réaffirmé que sa décision de sortie de l’Accord de Paris est irréversible malgré les tentatives de ses homologues de lui en dissuader. Et pourtant, les américains tentent de se ménager une voie de sortie en exigeant la mention suivante dans le texte final « les Etats-Unis vont travailler étroitement avec d'autres partenaires pour faciliter leur accès et leur utilisation plus propre et efficace des énergies fossiles ». Le président Donald Trump n’est pas à une contradiction près. Cet oxymore [énergies fossiles ‘propres’], par contagion à d’autres pays, risque de provoquer à terme l’affaiblissement de l’Accord de Paris. Est-ce la raison pour laquelle le président Emmanuel Macron a convoqué un Sommet sur le climat le 12 décembre prochain à Paris ? Seule la lutte contre le financement du terrorisme et sa propagande a fait l’unanimité au cours de ce Sommet. La déclaration commune à mi-parcours appelle au renforcement du rôle du Groupe d’Action Financière (GAFI), organisme intergouvernemental créé en 1989, dont l’objectif est de traquer les flux financiers illégaux ; y compris l’argent du terrorisme !
 
Et l’Afrique ?
Elle a été visible lors d’une journée spéciale « Africa Day » dédiée aux opportunités d'investissements qu'offre le continent. Dans ce cadre-là, plusieurs conférences et divers ateliers relatifs au développement ont eu lieu. En toute logique, le gouvernement fédéral a greffé, pour la circonstance, ces évènements sur les manifestations annuelles pour l’Afrique que la ville de Hambourg organise depuis maintenant cinq ans. Sinon, l’idée de l’Allemagne – puissance invitante - de placer dans l’agenda du G20 le développement de l’Afrique n’a pas résisté aux priorités des participants : le climat, le terrorisme et le business. Mais lors de cette année de présidence allemande de l’UE, la chancelière Angela Merkel a été à l’origine de plusieurs initiatives en faveur du continent africain. Ce pays de Cocagne – l’Afrique - suscite de plus en plus intérêts pour les entreprises allemandes ; somme toute logique pour la première économie européenne toujours en quête de matières premières et de débouchés pour son industrie. Madame Merkel a également pris conscience du risque pour l’Europe d’une vague de migrations venant d’Afrique sub-saharienne. Elle est hautement plus dangereuse que l’afflux des réfugiés qui arrivent de Syrie ou d’Afghanistan. Géographiquement proche et seulement séparée par la mer Méditerranée, l’arrivée de millions d’africains provoquerait un déséquilibre économique et démographique incommensurable en Europe. Le président du Conseil italien Paolo Gentiloni est sur la même longueur d’onde que la chancelière lorsque celui-ci déclara que « pour efficacement s'attaquer au problème des déplacements forcés et des migrations, nous devons soutenir un développement durable et stimuler les investissements dans les pays d'origine ». Une vision que ne partage pas les pays septentrionaux ou orientaux de l’Europe, qui sont confrontés  pour la plupart à d’autres flux migratoires : d’une part, les ukrainiens qui se réfugient en Pologne, en Lituanie ou encore en Lettonie ; d’autre part, les syriens et les afghans qui remontent par la route des Balkans. 

Les initiatives allemandes
L’Allemagne voulait profiter de sa présidence du G20 et du G7 pour faire avancer sa politique en faveur de l’Afrique. La démarche de la chancelière Angela Merkel respecte à la lettre les engagements pris lors du dernier G20 de Hangzhou (Chine). Ils préconisent en effet «  la nécessité de déployer des efforts à l'échelle mondiale pour faire face aux conséquences de la crise migratoire, répondre aux besoins de protection qu'elle engendre et s'attaquer à ses causes profondes ». D’ailleurs, l’Allemagne a associé la Chine à ce partenariat triangulaire avec l’Afrique ; tandis que l’Argentine, pays hôte du prochain G20, a d’ores et déjà inscrit le développement économique du continent africain dans son agenda.
Lors de la réunion préparatoire appelée G20-Finances qui s’est déroulée en mars dernier, à Baden-Baden, le grand argentier allemand Wolfgang Schaüble avait émis la volonté de l’Allemagne de « remodeler le partenariat entre les pays industrialisés et l'Afrique en misant sur la mobilisation de nouveaux instruments de financement de développement ». Cette idée a reçu le soutien de tous ses homologues. Elle a été réitérée par la chancelière, elle-même, en juin dernier lorsqu’elle a reçu à Berlin neufs chefs d’Etat africains pour une conférence intitulée : Partenariat G20-Afrique, investir dans un avenir commun. Est-ce un plan Marshall version allemande ? Il s’agit d’un programme de coopération appelé « compact with Africa » c’est-à-dire stimuler les investissements privés pour développer l’emploi et les infrastructures.  
 
Sur le papier cette initiative en faveur du continent mérite d’être saluée. Pour autant, s’il suffisait d’injecter les capitaux pour stimuler le développement économique, l’Afrique s’en serait déjà sortie de cette situation inextricable depuis des décennies. Les Investissements Directs à l’Etranger (IDE) c’est-à-dire le flux de capitaux étrangers vers le continent progressent régulièrement : 11,4% en 2016 contre 9,4% en 2015 ; ce qui nous confère ainsi la deuxième destination à plus forte croissance des IDE en capital. Mais l’effet d’entraînement (spillover) n’est pas au rendez-vous. Ces capitaux sont censés contribuer aux gains de productivité, apporter une meilleure formation pour la main d’œuvre locale. Malheureusement, les effets induits restent limités. Ils sont freinés par la capacité d’absorption des pays africains et les coûts élevés de certains facteurs de production comme l’électricité. La situation du continent africain est très complexe et les problèmes à résoudre dans l’urgence sont incommensurables. Cette solution que préconise l’Allemagne se focalise davantage sur l’injection de capitaux. Mais cette politique sera vouée à l’échec si elle n’est pas accompagnée d’un volet financier destiné à renforcer les capacités. Il est en effet indispensable de mener au préalables des réformes (bonne gouvernance, lutter contre la corruption, améliorer la collecte des impôts…), d’investir dans la formation et l’éducation des jeunes. Où en est aujourd’hui le consensus de Monterrey (Mexique – 2002) : chaque pays signataire s’engage à allouer 0,7% de son PIB annuel dans l’Aide Publique au Développement (APD) ? Selon le rapport du Sénat français (2016), seuls la Suède, la Norvège, le Luxembourg, le Danemark, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont respecté leur engagement. Cependant, la plus forte progression est celle de l’Allemagne : + 26% soit 17,8 milliards $ ou encore 0,5% de PIB. En 2015, Berlin a multiplié par 17 son aide en faveur des réfugiés : 3 milliards $ contre 373 millions $ pour la France.
 
Lors de ce G20, les dossiers brûlants du continent africain ont été éclipsés par les préoccupations des grandes puissances. Pour filer une métaphore footballistique, les chefs d’Etat africains ont joué en lever de rideau avec la chancelière Angela Merkel dès le 12 juin à Berlin. Pourtant, la lutte contre le changement climatique concerne également le continent ; notamment en matière de financement. L’Afrique subit de plein fouet les méfaits du réchauffement de la planète alors qu’elle ne bénéficie que moins de 5% des fonds qui y sont destinés. Outre les problèmes économiques, on ne le répètera jamais assez, le climat et le terrorisme sont les principales raisons de déplacement de la population en Afrique sub-saharienne. Or, si l’Europe veut stopper l’afflux des migrants qui échouent sur les côtes siciliennes en provenance de Libye, il faut déjà qu’elle soutienne un peu plus l’opération Barkhane (G5 Sahel + la France). L’UE n’a promis que 50 millions €uros pour la constitution d’une force conjointe sur un besoin estimé à quelques 423 millions €. Ce dernier chiffre équivaut seulement à 3% des 17 milliards $ que l’Allemagne a dépensé pour venir en aide aux réfugiés sur son sol !
 
Alex ZAKA
Paru dans le Diasporas-News n°87 de Juillet-Août 2017 


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